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Inventaire avant liquidation

[Techniques psychanalytiques et transfert narcissique]

13 Novembre 2017 , Rédigé par Narcipat Publié dans #61 : Narcipat?

 

    D. TECHNIQUES PSYCHANALYTIQUES ET TRANSFERT NARCISSIQUE

 

    Si je le comprends bien, toute la stratégie de Kohut vise à permettre le plein établissement d’un transfert narcissique, en particulier le déploiement d’un transfert en miroir qui reflète l’activation du soi grandiose. Il montre que ce développement du transfert complète un processus normal qui a été arrêté, celui de l’internalisation du soi-objet idéal à l’intérieur du surmoi [Je pense que je suis arrivé tout seul à un truc de ce genre, ou ai bien progressé en ce sens; que la démesure de l’ambition ne serait pas, en soi, mauvaise; mais que la conviction d’être déjà ce que je prétends essayer de devenir, subsiste, clivée.] et permet la croissance correspondante depuis un narcissisme primitif jusqu’à un narcissisme mature. Kohut suggère que « lorsque dans l’analyse des troubles narcissiques un transfert idéalisant commence à germer, il n’y a qu’une seule attitude correcte sur le plan analytique : celle qui consiste à accepter l’admiration du patient ». L’analyste, ajoute Kohut, « interprète les résistances du patient à la révélation de son sentiment de grandeur, et lui démontre non seulement que son sentiment de grandeur et son exhibitionnisme ont déjà joué un rôle en leur temps mais qu’ils doivent maintenant pouvoir devenir conscients. [Et quand ils le sont déjà?] Toutefois, durant une phase prolongée de l’analyse, il est presque toujours nuisible de souligner l’aspect irrationnel des fantasmes de grandeur du patient ou la nécessité où il se trouve de restreindre ses exigences d’exhibitionnisme. En fait, l’intégration au réel du sentiment de grandeur et de l’exhibitionnisme infantile du patient se fera spontanément et calmement (quoique très lentement) si le patient est capable, aidé par la compréhension empathique qu’a l’analyste du transfert au miroir, de maintenir la mobilisation du soi grandiose et d’exposer le moi à ses exigences. »

 

    Kohut reconnaît : « au premier abord, je peux sembler affirmer que dans des cas de ce genre l’analyste doit se rendre aux désirs transférentiels de l’analysé, c’est-à-dire, dans le cas qui nous intéresse ici, qu’il doit fournir à la patiente une “expérience émotionnelle corrective” en lui offrant cet écho émotionnel, cette approbation qu’elle n’avait pu recevoir de sa mère dépressive ». En objection à cette interprétation, Kohut affirme : « bien que, pour des raisons tactiques (par exemple pour obtenir la collaboration d’un secteur du moi de l’analysé), l’analyste puisse, en pareil cas, avoir passagèrement à se soumettre avec regret aux désirs infantiles, la véritable visée de la cure ne consiste pas dans la gratification mais bien plutôt dans la domination fondée sur l’insight et atteinte dans le cadre d’une (tolérable) abstinence analytique ».

 

    Lorsqu’il discute les résultats de son approche, il affirme : « les résultats essentiels du traitement analytique des personnalités narcissiques se produisent dans le domaine narcissique lui-même et les modifications obtenues constituent dans la plupart des cas le résultat le plus important du point de vue thérapeutique ». Il considère l’accroissement et l’extension de la capacité du patient à un amour objectal comme « le changement spécifique le plus important » et dit que « cela explique que l’accessibilité croissante d’investissements instinctuels-objectaux à mesure que l’analyse progresse n’indique habituellement pas que le narcissisme mobilisé s’est transformé en amour objectal : elle doit plutôt être attribuée à la libération d’une libido objectale jusque là refoulée : autrement dit, elle provient de succès thérapeutiques dans des secteurs de psychologie secondaire (névrose de transfert) chez un patient atteint de troubles narcissiques primaires. »

    [Décidément je ne suis pas d’accord avec Kohut non plus. Certes tout cela ne traite que de la relation analytique que je ne connaîtrai jamais (raison pour quoi je me rase à cent drachmes l’heure). Mais il me semble qu’elle ne présenterait pas une différence de nature avec ce que je vis ces jours-ci (ou plutôt ai vécu, car ça se résorbe) et qui m’a poussé à poser le décor de la Tour [un jour sur deux, en alternance avec la copie commentée de Kernberg], c’est-à-dire de me sentir accepté au sein d’une collectivité, parce qu’utile. L’étrange est que lorsque j’écris une lettre, un compte-rendu, etc, au nom du conseil syndical ou de l’ensemble des résidents, tout le monde se reconnaît, il m’en parvient des échos. Et il est exact que j’y suis très respectueux des faits et des opinions majoritaires, relativisant la mienne à tel point que nul ne devinerait le signataire… mais la glissant au passage sous la caution d’autrui. Je me sens habité par la collectivité, et l’humble serviteur de ses desiderata… mais dans un premier temps? Dès qu’on m’accepte, n’ai-je pas tendance à demander davantage, et à aspirer à la dictature? Je ne crois pas : même sur les points qui tiennent au cœur des masses, et me paraissent très subalternes (comme la propreté de l’immeuble) je me sens euphorique d’être un simple porte-parole, et de jouir, pour la première fois depuis un bail, d’une certaine confiance. [Ça se gâtera ensuite, de par le vice intrinsèque de la démocratie, chacun exigeant de donner en personne son avis sur la façon de planter un clou, vice qui rendait insupportable ma phagocytation visible de leur discours, “puisque je n’étais pas plus qu’eux”. Les mêmes supporteraient plus tard la lourde et la ruine, de la part d’un vautour dûment casquetté (ou d’un aigle : je n’ai pas encore de certitude).] On dirait qu’il suffisait de me reconnaître pour me guérir. Et qu’un sentiment pourrait naître pour la principale productrice de reconnaissance, Céline, toute moche, tireuse de couverture et pas géniale qu’elle est. [Pour la grotesque amorce d’“amour” unilatéral, voir ici sqq.] Mais il ne s’agit pas du tout d’une “libération de libido objectale” : je persiste à dire que ce truc-là n’existe pas chez moi, et que le feu sacré s’alimente au bois narcissique.]

 

    Je suis d’accord avec Kohut, que [sic] le traitement psychanalytique des personnalités narcissiques est centré sur l’activation du soi grandiose et sur la nécessité d’aider le patient à parvenir à prendre pleinement conscience de celui-ci au sein d’une situation analytique neutre, mais je pense que se focaliser exclusivement sur les résistances narcissiques du seul point de vue des conflits libidinaux aboutit à méconnaître presque totalement les vicissitudes de l’agressivité chez ces patients, <et> gêne l’interprétation systématique des fonctions défensives du soi grandiose. À mon avis, il faut interpréter systématiquement, à la fois l’idéalisation primitive et le contrôle omnipotent de l’analyste; le patient doit prendre conscience, dans une atmosphère évidemment non critique, de son besoin de dévaloriser et de déprécier l’analyste comme objet indépendant afin de se protéger d’une réactivation de la rage et de l’envie orale sous-jacentes et par conséquent de la crainte de retaliation [Sic : moi, je veux bien; “talion” et le contexte sont assez clairs; mais il me semble que les français “représailles” ou “rétorsion” feraient fort bien l’affaire...] de la part de l’analyste. La crainte de retaliation (dérivée des projections sadiques activées par les frustrations réelles ou fantasmatiques qu’il a suscitées) et la crainte de culpabilité (parce que le patient attaque l’analyste comme objet primitif qui donne quelque chose) [Ce dont on a peur, alors, ce n’est pas de la culpabilité en soi, mais du châtiment : retaliation (ou quelque équivalent français) semble suffire.] sont les principaux motifs contre lesquels les résistances narcissiques ont été érigées. [Je n’en crois toujours rien : la crainte princeps, c’est celle d’être dérisoire, indigne, négligeable, d’être non pas attaqué, mais délaissé, ou renvoyé à son néant. N’est-ce là qu’une spécialisation de la culpabilité au sein de l’immoralisme, ou d’une “morale de l’intelligence” que je projetterais sur tout le monde, parce que c’est la mienne? Je crois plutôt que Kernberg ramène sa morale où elle n’a que faire, et qu’il reste aveugle au fond de la question [la prétention du maraud laisse pantois!] : le narcipat ne possède rien, ni désirs libidinaux, ni authentique agressivité, c’est un objet en attente d’aval, et qui feint d’être sujet, en brandissant certains attributs du sujet, pour obtenir cet aval, le self grandiose étant lui-même évidé de l’intérieur. L’envie est sans doute fondatrice, mais elle est essentiellement envie d’être, donc d’être perçu, et fonctionne en couple avec la peur d’être démasqué, et perçu comme néant. Toutes ces fureurs secrètes, en dernière analyse (enfin… provisoirement dernière), ne visent pas l’Autre en général, ni les parents en particulier, ni l’analyste, parce qu’ils sont les supports contenants sans lesquels nous disparaissons. Nous ne parvenons pas à nous croire capables de leur faire aucun mal, donc a fortiori à éprouver la moindre culpabilité pour cela; la faculté d’aimer ou de haïr ne nous a pas été donnée, et je crains bien qu’il ne soit trop tard pour qu’elle se développe, à moins qu’il ne suffise de se sentir aimé, apprécié, utile : je fais cette expérience ces temps-ci, et elle occasionne une révolution interne dont je tenterai le bilan  [icidans quelques jours, à moins qu’elle ne fasse voler ce blog en éclats.] Il faut les explorer et les interpréter systématiquement avant que le transfert ne prenne les habituelles caractéristiques des névroses de transfert. Les efforts des patients pour conserver leur soi grandiose et pour éviter de reconnaître que l’analyste est une personne indépendante, autonome, révèlent l’importance de la défense contre l’envie intense, contre la relation redoutable à une image maternelle haïe, perçue de façon sadique [Balivernes, même si c’est toujours le soi grandiose qui s’exprime de façon aussi tranchante : voir plus haut, c’est bien plus grave que ça : cette image, maternelle, paternelle, n’importe, me met en danger, parce qu’elle dispose de mon être : la nier préventivement, c’est interjeter appel du “verdict de néant”] et contre leur crainte d’un sentiment de solitude et de vide dans un monde privé de signification personnelle. [Voilà qui me semble un peu plus profond, mais qu’on ne peut pas rajouter tout tranquillement comme ça en fin de phrase, comme si c’était accessoire et ne requérait pas d’être justifié.]

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