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Inventaire avant liquidation

[Contre-transferts négatifs]

28 Octobre 2017 , Rédigé par Narcipat Publié dans #61 : Narcipat?

 

    Parfois, il est difficile d’imaginer combien sont fréquentes et se répètent de telles interactions qui s’étendent sur plus de deux ou trois ans d’analyse [sans maximum précisé; comme il s’agit d’un régime de cinq analyses par semaine, à peu près, on parle là de 500, de 800 séances négatives, ou davantage, sans aucune assurance de déboucher sur mieux : il se peut que le psy souffre de se sentir inutile; mais son compte en banque, lui, ne s’en porte pas plus mal]; cette résistance au traitement illustre l’intensité du besoin du patient narcissique à dénier toute relation de dépendance. Il est évident qu’un examen approfondi du transfert négatif est encore plus fondamental chez ces patients que chez les autres patients qui ont entrepris une analyse. De façon permanente, ils cherchent à dévaloriser le processus analytique, à dénier la réalité de leur propre vie affective, et à confirmer leurs fantasmes que l’analyste ne constitue pas une personne indépendante d’eux-mêmes. [Je n’arrive toujours pas à comprendre cela [ça va ça vient, apparemment] : qu’il y ait un dérèglement de l’approche des autres en général, admettons, quoiqu’il soit difficile de le cerner quand on y baigne. Ils ne nous  intéressent que comme regard et reflet; mais leur indépendance est indispensable! Il nous faut quelqu’un à séduire, à convaincre. Ce que K. appelle “personne indépendante”, serait-ce celle dont l’altérité, irréductible, ne peut être abordée qu’en extériorité? Je suis au bout de mon latin, et le problème, comme d’hab, c’est que je ne suis pas sûr qu’il y ait quelque chose à comprendre, Kernberg me paraissant simplifier – et s'enfermer dans l'analystocentrisme; à moins que je ne refuse tout simplement moi-même la donnée de base, c'est-à-dire la nécessaire dépendance du transfert.] Un récent film d’Ingmar Bergman, Persona, illustre l’effondrement d’une jeune femme immature, mais au fond tout à fait convenable, une nurse, qui est chargée de s’occuper d’une femme psychiquement très malade; cette dernière est ce qu’on pourrait appeler une personnalité narcissique typique. Devant l’exploitation froide et sans scrupule à laquelle on la soumet, la jeune femme s’effondre progressivement, elle ne peut supporter que l’autre femme malade ne renvoie que la haine pour l’amour et se montre totalement incapable de reconnaître tout sentiment d’amour ou tout sentiment simplement humain qu’on lui exprime. Cette femme malade ne semble pouvoir vivre que si et quand elle peut détruire ce qui est valable chez les autres même si elle en arrive à se détruire comme être humain dans le même temps. [Ça, c’est mézigue perçu par Kapok! Je n’ai pas vu Persona, mais ce refus de reconnaître “tout sentiment d’amour ou simplement humain” m’est familier. Le fait est pourtant que les sentiments en question (et ici, à quoi d’autre aurait-on affaire qu’à la pitié, qu’il est humiliant pour tout le monde d’accepter comme telle?) dissimulent toujours le narcissisme : je n’ai pas constaté une exception. On serait donc poire d’y croire. Mais c’est moins d’y croire qui coince que d’en accuser réception.]

 

    Au cours de ce drame, la nurse développe une haine intense pour cette femme malade et la maltraite cruellement. C’est comme si toute la haine à l’intérieur de la malade avait été transférée dans la personne qui l’aidait, détruisant celle-ci de l’intérieur. Ce film reproduit l’essence des situations de transfert-contre-transfert qui se développent dans le traitement des patients narcissiques graves. Tous les efforts des patients semblent destinés à vaincre l’analyste, à faire de l’analyse un jeu gratuit, à détruire systématiquement tout ce qu’ils ressentent comme bon ou valable chez l’analyste. Après que le patient l’eut [sic : plutôt “l’a”, pour la concordance] traité pendant plusieurs mois ou années comme un “appendice” (par un procédé qui peut être très subtil et rester ignoré pendant longtemps), l’analyste peut commencer à se sentir réellement “méprisable” dans son travail avec ce patient. Tous ses commentaires ou interprétations semblent perdre leur signification et tout sentiment sympathique qu’il peut avoir pour le patient est ensuite systématiquement détruit par la suite [sic]. Après un traitement prolongé et infructueux, une défense par la dévalorisation du patient peut survenir chez l’analyste, ce qui renforce chez le patient les sentiments [sic] que son analyste devient l’un des objets dangereux auxquels il a déjà tenté d’échapper; ou encore une minime frustration peut se transformer en une prise de conscience chez le patient que l’analyste ne le contrôle plus. Le traitement peut alors s’interrompre; le patient échappe à l’objet transférentiel haï et frustrant qu’il réduit finalement une fois de plus à une “ombre”, et le contre-transfert de l’analyste peut refléter un sentiment correspondant de “vide” comme si le patient n’avait jamais existé. [Tout cela est bel et bon; mais il y transparaît le désir de regagner une position dominante, et de rejeter sur l’analysant seul la responsabilité de l’échec. Comme si tous les “commentaires et interprétations” de l’analyste étaient obligatoirement valables, et si leur rejet ne pouvait être dû qu’aux résistances du méchant patient. On n’est pas choqué de lire Lacan dire de son didacticien qu’il était « trop con pour <l’>analyser », parce que c’est Lacan, et qu’il est du bâtiment. Mais le patient lambda, comment peut-il se permettre? Or, désolé, tout ce blabla semble avoir pour objectif premier de rappeler l’infaillibilité du praticien : si ça ne marche pas, il ne saurait en être responsable en rien! Et certes, c’est le cas, si la “réussite” du transfert suppose qu’on accepte n’importe quoi, comme certaines études semblent l’avoir établi : l’amélioration des patients (mieux vaut éviter le mot guérison) serait indépendante de la teneur des interprétations, donc de leur validité, à moins d’accepter une vérité plurielle.]

 

    Il y a, dans ce qu’on vient d’envisager, plusieurs conséquences techniques. D’abord, l’analyste doit continuellement se concentrer sur la qualité particulière du transfert de ces patients et s’opposer de façon efficace aux efforts de contrôle omnipotent et de dévalorisation du patient. Ensuite l’analyste doit aussi observer attentivement les mouvements contre-transférentiels au long cours. Il introduira le contre-transfert dans le processus analytique, non pas en révélant au patient que ce sont ses propres réactions [Ben voyons! Ce serait reconnaître une faiblesse! [Oriane, ô surprise, était/sera moins faux-cul.]], mais en reconnaissant dans le contre-transfert les intentions cachées de la conduite du patient. Par exemple, lorsque, pendant très longtemps, le patient rejette systématiquement toutes les interprétations de l’analyste, ce dernier peut reconnaître ses propres sentiments d’impuissance qui en résultent et montrer au patient qu’il traite l’analyste comme s’il souhaitait que l’analyste [Quel style, seigneur! On dirait parfois que je “les” choisis pour m’afficher meilleur, au moins sous ce rapport.] se sente vaincu et impuissant. Ou lorsque la conduite délinquante du patient fait que l’analyste devient plus soucieux que le patient des conséquences, l’analyste peut montrer au patient qu’il paraît tenter de provoquer chez lui un sentiment de préoccupation devant cette conduite, parce que le patient lui-même ne peut tolérer un tel sentiment. [= “de préoccupation devant cette conduite”? Inextricable.] Parce que les patients traitent l’analyste comme l’un des prolongements d’eux-mêmes ou vice-versa, le vécu affectif de l’analyste traduit avec plus d’exactitude que d’habitude ce contre quoi le patient est intérieurement en train de lutter, et ainsi, l’utilisation des réactions du contre-transfert apporte des éclaircissements particuliers au cours de ce traitement. [En tout cas, il plaît à l’analyste de le croire.]

 

    Un problème technique que le thérapeute a beaucoup de mal à manier est la survenue soudaine de “volte-face” dans l’attitude affective du patient. En particulier après des moments de compréhension ou de soulagement, le patient a tendance à délaisser tout le problème en question, au lieu d’être contraint de ressentir un sentiment de reconnaissance pour cette aide ou de se motiver pour approfondir la compréhension de ce point particulier. La tendance à dévaloriser l’analyste opère ici, en même temps que l’effort pour dérober à l’analyste son interprétation; on doit être très attentif à cette soudaine “contradiction” de ce qui, quelques minutes auparavant ou à la séance précédente, semblait être un problème important. [Qu’importe que l’interprétation soit “dérobée”, si elle est assimilée? Mais il faut en faire hommage à l’analyste : c’est la dépendance qui importe, non l’interprétation. Quant aux changements de cap, reste à savoir si la difficulté à fixer son attention ne serait pas inhérente au narcissisme pathologique. Ma pauvre tête n’est tout de même pas la seule à tournicoter vertigineusement! À suivre…]

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