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Inventaire avant liquidation

[Restauration des relations d’objet… et de la dépendance]

4 Novembre 2017 , Rédigé par Narcipat Publié dans #61 : Narcipat?

 

    À ce moment, une situation très difficile survient pour le patient : il doit reconnaître de façon réaliste les bons aspects de l’analyste (mère) qu’il a auparavant déniés et dévalorisés et supporter un sentiment déchirant de culpabilité à cause de son ancienne agressivité contre l’analyste. [Franchement, à moins d’une inacceptable aliénation, je n’arrive pas à en admettre la simple possibilité. Une culpabilité déchirante parce qu’on a résisté à tes interprétations! Je crois que tu rêves. En tout cas, je refuse une “thérapie” qui passerait par là.] Le patient peut connaître le désespoir d’avoir maltraité l’analyste et tout son entourage et avoir le sentiment qu’il a en réalité détruit ceux qu’il aurait pu aimer et ceux qui pouvaient l’avoir aimé. [Bien sûr, je n’en suis pas là, donc n’en puis juger. Ce sont des nouvelles d’un autre monde. Qu’on puisse m’aimer n’est même pas pensable; ou alors des fillettes et des laissées-pour-compte, qui ne cherchent que des yeux pour s’aimer, un pouvoir où se fonder, et ne feraient pas le moindre sacrifice pour cet “amour”.] Il risque maintenant d’avoir des pensées et des intentions suicidaires intenses; mais si on l’a accepté en analyse en raison de la bonne force de son moi, il peut perlaborer ce conflit sans que son analyste le rassure prématurément. [M’est avis que les velléités de suicide ne proviennent pas de cette culpabilité, mais de celle qui est liée à l’effondrement du self grandiose, et au champ de ruines qu’il laisse.] Lorsque le patient narcissique perlabore cette phase cruciale de l’analyse, il en vient à reconnaître que l’analyste est un être indépendant pour lequel il peut ressentir amour et gratitude. Simultanément, le patient commencera à reconnaître l’existence indépendante des personnes de son entourage. Pour la première fois, il peut montrer une curiosité authentique pour ce qui se passe chez les autres, s’y intéresser et en tirer satisfaction. C’est comme si ces personnes devenaient vivantes dans le monde externe du patient aussi bien que dans son monde interne d’objets et d’expérience de soi, son “monde de représentations”. Cette étape de l’analyse est en contraste frappant avec le vide précédent de la vie fantasmatique et affective. [Du fait sans doute du forclos, du dénié ou du refoulé, il y a là quelque chose que je n’entends point : je reconnais que les autres me font bâiller; il faut tout de même voir qu’ils sont objectivement rasoir, banals et convenus. Les rares lettres vivantes et soignées que j’aie reçues, d’Anne, par exemple, ou de Charles, je les relisais – moins que les miennes, affaire entendue, et un peu par devoir, mais tout de même, je ne peux pas imputer la médiocrité des gens à mon inappétence, et il me semble que si survenaient Stavroguine ou Mychkine, je fermerais ma gueule pour les écouter. N’empêche, c’est vrai que je n’ai aucune curiosité des autres en soi, et qu’il m’est arrivé de tomber des nues d’apprendre que telle classée pétasse en chaleur avait passé ses vacances à laver des vieilles au mouroir de Mère Theresa. Je suis tout à fait du genre à enseigner aux gens ce qu’il faut penser d’un pays où ils ont passé la moitié de leur vie, et que je n’avais fait que traverser; quand j’ai revu Hélène, qui engrange plus d’émotions en quinze jours que moi en un an, je ne lui ai posé de questions – et encore, pas des masses – que sur les zones obscures de notre liaison, alors vieille d’une décennie (mais c’est aussi que je redoutais d’apprendre à quel point l’intervalle l’avait plus passionnée, et ça vaut pour les autres). Ce que je ne saisis pas, c’est en quoi cette incuriosité implique qu’ils ne soient pas indépendants. Qu’ils vivent quand je ne suis pas là, et ne pensent pas à moi trente secondes par mois, c’est l’évidence. On en vient à se demander si ce n’est pas le narcissisme de Kernberg soi-même qui est blessé par l’indifférence de son patient.]

    Une régression normale au service du moi implique une dimension particulière, la réactivation de l’ancienne relation d’objet interne qui est une source de soutien interne au moment de crise, de solitude ou de perte de soutien externe. Normalement, la richesse affective qui provient d’anciennes relations heureuses avec les autres non seulement permet de prendre un plaisir empathique au bonheur présent des autres, mais est aussi une source de consolation interne lorsque la réalité menace de provoquer une perte de l’estime de soi. Les patients narcissiques ne sont pas capables de recourir de cette manière à leur propre passé. Si leur traitement réussit, ils arrivent à réaliser une vie plus profonde et significative, et commencent à tirer des sources de force et de créativité de leur monde nouvellement développé de relations d’objet internalisées. [De bonheur, peut-être. De force, c’est vague. Et de créativité, je voudrais voir ça sur pièces. Pour moi, l’irruption des autres, c’est celle du plat, du convenu, de l’insipide. La créativité, la valable s’entend, [La factice, plutôt. Il y a sept ans, je ne l’avais pas encore saisi, apparemment. Miracle! On enregistre un progrès!] résulte de l’effort de se démarquer d’eux. La joie de créer m’est refusée, j’en conviens, du fait de la vigilance surmoïque, et surtout d’une carence d’intérêt propre pour l’objet. Mais s’il suffisait d’“aimer vraiment” pour devenir créatif, comme on dit, ça se saurait.]

    Le cas suivant illustre cette phase cruciale du traitement chez un patient particulier. Ce patient commença soudain à prendre conscience qu’il avait toujours traité l’analyste comme un “miroir” de lui-même et s’en était servi comme d’une sorte d’esclave puissant au service exclusif du patient, quelque chose comme le génie dans le conte de fée de la lampe d’Aladin. Il réalisa que, entre les séances, il avait eu le sentiment que l’analyste disparaissait dans une existence purement potentielle, comme si l’analyste était enfermé dans une bouteille que le patient pouvait jeter. À ce moment, pour la première fois après des années d’analyse, le patient se montra curieux de la vie de l’analyste, et en éprouva de l’envie. [La vie de l’analyste! Parles d’un objet de fascination! Dirait-on pas que le théoricien de la narcipathologie est narcipat lui-même? Du reste je serais bien niais de m’en étonner.] Il prit conscience de sentiment de colère et de regret lorsqu’il était séparé de l’analyste pendant les week-ends et eut aussi des sentiments de gratitude lorsque l’analyste avait bien voulu “le garder” en dépit de sa conduite toujours déplaisante. [Ma foi, je ne sais pas si le bonhomme est guéri, mais il est devenu dépendant : quelle victoire! Tout porte à penser que c’est cela que K. cherche à obtenir d’abord, et peut-être seulement. Très peu pour moi : je vois trop ce que je perdrais à cette dépendance sans réciprocité; le gain, lui, n’est pas évident.]

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