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Inventaire avant liquidation

[Narcissisme infantile et narcissisme pathologique]

8 Novembre 2017 , Rédigé par Narcipat Publié dans #61 : Narcipat?

    C. LA RELATION ENTRE NARCISSISME NORMAL ET PATHOLOGIQUE

 

    1. ARRÊT DE DÉVELOPPEMENT OU DÉVELOPPEMENT PATHOLOGIQUE?

    [Kernberg, divergeant de Kohut là-dessus, se prononce pour le deux. Moi aussi, mais mieux vaut ne pas trop creuser cet “accord” du limaçon. Encore deux pages supprimées, où le concret brillait par son absence.]

    Résumons ces trois points de vue dans une conclusion d’ensemble : l’investissement narcissique (c’est-à-dire l’investissement dans le soi) et l’investissement d’objet (c’est-à-dire l’investissement dans les représentations d’autrui et dans les autres êtres humains) apparaissent en même temps et s’influencent l’une l’autre de façon étroite, si bien qu’on ne peut étudier les vicissitudes du narcissisme sans étudier les vicissitudes des relations d’objet, de la même manière qu’on ne peut étudier les vicissitudes du narcissisme normal et pathologique sans les relier au développement des relations d’objet internalisées, liées aux rejetons pulsionnels à la fois libidinaux et agressifs.

    [On ne peut plus partisan, naturellement, d’étudier tout à la fois, mais ce qui précède pèche à mes yeux par abstraction excessive. Je ne suis pas aveugle à l’enjeu du débat (régression ou élaboration d’un système nouveau), et pencherais pour le 2, mais j’aimerais être sûr que ce blabla fût déduit d’une observation concrète, et bien souvent Kernberg me semble trop théoricien (et trop attaché au dogme) pour bien observer… les succès thérapeutiques (à supposer qu’il en eût) ne prouvant rien, puisqu’ils peuvent tout bonnement relever de la suggestion. Cela dit, cette mienne incapacité à l’abstraction n’est-elle pas elle-même narcipathologique? Ne tient-elle pas au handicap qui affecterait toute sublimation (symbolisation, plutôt)? Sans oublier la part de l’ignorance : je ne crois pas vraiment à la psychanalyse, mais surtout je n’ai pas les bases. Parfois il me semble être de ces “primitifs” dont cause Barthes, qui, de tout le film ne voient que le poulet qui traverse la place du village, ou de ces ploucs qui se reconnaissent à tel ou tel détail précis dans tous les bouquins de psy qu’ils ouvrent! Ce qui ne serait rien, sans la prétention, patente ici même, de donner des leçons aux maîtres, ou de les améliorer… Mais ayons au moins le courage de nore outrecuidance, le temps de finir.]

 

    2. DIFFÉRENCE ENTRE NARCISSISME INFANTILE ET PATHOLOGIQUE

 

    Voici dans ce qui suit quelques remarques cliniques pertinentes. [Curieux autosatisfecit. Mais que traduit “pertinent”? Cet adjectif devrait dénoter une adéquation à autre chose qu’à son propre discours. Or on dirait que les traits sur lesquels s’appuie le diagnostic différentiel sont réutilisés pour en montrer la validité.] Le diagnostic différentiel entre personnalité narcissique, personnalité obsessionnelle, personnalité dépressive avec des traits masochistes, ou personnalité hystérique (c’est-à-dire entre patients narcissiques qui fonctionnent relativement bien et les autres types de pathologie de personnalité) illustre combien les patients narcissiques semblent non seulement s’aimer eux-mêmes de façon excessive mais comment ils le font d’une mauvaise manière, souvent en se rabaissant eux-mêmes, si bien qu’on en conclut que ces patients ne se traitent pas mieux que leurs autres relations. Leur conviction d’être “artificiels”, leur manque profond de confiance en l’existence de quelque chose de bon et de valable qui puisse émerger d’une investigation honnête de soi [J'engrasse, tout en pensant que “nous” nourrissons l'espoir, en profondeur, d'être intégralement pardonnés, réhabilités, dignes d'admiration, si cette investigation est vraiment honnête, et que le vrai “mal”, que l'introspection est appelée à dissiper, c'est l'ignorance de ce qu'on est], leur négligence et leur méconnaissance parfois étonnante de leur “image de marque”, qu’il s’agisse d’honnêteté, de bienséance ou de convictions dans des valeurs éthiques, sont de bien médiocres moyens de s’aimer eux-mêmes. [Un “méconnaissance” gauche et peu clair  : sommes-nous accusés de ne pas nous rendre compte de l’effet que nous produisons? ou de ne pas soigner notre apparence? Kernberg a l’air de trouver tout simple de faire le nécessaire pour plaire; mais s’il faut pour cela faire comme tout le monde et afficher des “valeurs éthiques” qu’on estime fallacieuses, surdéguiser un faux self d’oripeaux de théâtre… Nous avons besoin d’être distingués et avalisés tels que nous sommes, “artificiels” ou non : le suivisme n’est pas une solution. Par ailleurs, je m’insurge toujours contre cet “amour de soi” qui n’est qu’une facilité de langage. Est-ce que je m’aime, ou me hais? Ça n’a aucun sens : je voudrais être aimé (ou, dans une position de repli, admiré), mais que signifierait de m’aimer moi-même? L’ego n’a pas de concurrent pour l’ego! Quand je relis vingt fois une de mes lettres, avant et après envoi, ou contemple des photos de ma tronche prises par ma sœur lors de notre dernière virée, et reçues six mois après, c’est en essayant de les voir avec les yeux d’un(e) autre, qui, dans le cas 2, trouverait ma hideur sympathique ou mystérieuse; tout différent est le regard que je porte sur un délicieux minois de fillette! Je ne comprends pas qu’on puisse utiliser le même verbe, sinon par routine. [Et je suis très attaché, dirait-on, à la distinction que me procure cette incompréhension, à mes propres yeux, puisque je ne manque pas une occasion de la rappeler. N’ai-je pas tout simplement honte de m’aimer publiquement, au cas où je ne vaudrais pas un clou?]]

 

    Les traits suivants distinguent le narcissisme pathologique du narcissisme normal des petits enfants : 1. Les fantasmes grandioses des petits enfants normaux, leur désir coléreux de contrôler leur mère, et de rester au centre de l’attention de chacun, ont une qualité beaucoup plus réaliste que ce qu’on voit chez les personnalités narcissiques. [Il faudrait préciser cela. Tel quel, de la daube. Est-il réaliste de se croire omniscient, le plus beau ou le plus intelligent du monde, comme une flopée de gosses? Ou qu’on sait tout ce qu’il y aura jamais à savoir, puisqu’on connaît les noms de tous les dinosaures? Ceux-là sont-ils tous narcipats? [La question se pose, en fait. La “flopée de gosses”, je l’invente, tout simplement. Quant au n° 2, c’est Sylvain vers six ou sept ans; or précisément, il semble à dix-sept aussi atteint que moi-même, et, pour comble, d'une incroyable fidélité à sa petite enfance, puisque non seulement il ne démord pas de devenir paléontologue, mais encore de se spécialiser dans les dinosaures! Dans un cas pareil, on a du mal à s’interdire une explication par l’atavisme : le gène paternel aurait tout bonnement sauté ma frangine, arf, à moins que chez elle il ne cache très bien son jeu [1]…]] 2. L’excessive réaction du petit enfant aux critiques, échecs, blâmes, comme son besoin d’être le centre d’attention, d’admiration et d’amour, coexistent avec une expression simultanée d’amour, de gratitude sincère et d’intérêt pour ces objets quand il n’est pas dans une situation de frustration; [Mais moi aussi, s’il n’y a que ça! Quand je ne suis pas en situation de frustration (c’est-à-dire quelques minutes par an), j’éprouve une grande indulgence, de la sollicitude même, pour les autres, et il m’arrive de m’aventurer sur le versant compassionnel de l’empathie. Le problème, c’est que nous sommes presque toujours frustrés. [Hyperboles ridicules : je suis toujours frustré, en un sens. Mais je l’oublie la plupart du temps.]] par dessus tout, cela coexiste avec une capacité à faire confiance et à dépendre des objets importants. La capacité d’un enfant de deux ans et demi à maintenir l’investissement libidinal de sa mère pendant des séparations temporaires contraste de façon frappante avec l’incapacité du patient narcissique à dépendre d’autres personnes (y compris l’analyste) au-delà d’une satisfaction de ses besoins immédiats. [Quand on aime une fille, même de la “mauvaise manière”, on est tout de même dépendant! Mais bien sûr, la confiance faisant défaut, on se tient en permanence prêt à virer de bord – et le lui fait un peu trop savoir pour qu’elle ne vous largue pas prestement, à moins qu’elle ne soit tout à fait esclave, donc ennuyeuse.] 3. Le narcissisme infantile normal se reflète dans des demandes de l’enfant liées à des besoins réels, tandis que la demande du narcissisme pathologique est excessive, ne peut jamais être satisfaite, et se révèle régulièrement secondaire à un processus de destruction interne de ce qu’il a reçu. [Le NP demande non pas la satisfaction de besoins matériels par trop vagues et évasifs chez lui, mais, éventuellement à travers eux, une reconnaissance. Caresses et cadeaux sont avant tout perçus comme signes d’une distinction. Peut-être y a-t-il là, en effet, une différence de fond. Narcipat est cet enfant déplaisant qui boude son plaisir (ou n’en éprouve aucun) pour rester créancier – et à qui, en conséquence, l’on n’a nul plaisir à donner, alors que ceux qui jouissent du cadeau vous font fondre, même quand ils ne disent pas merci… à moins qu’ils ne me fassent fondre, parce que le bonheur qu’ils arborent me tient lieu de reconnaissance. Il est parfaitement vrai que nous n’arrivons à nous satisfaire durablement de rien; mais existe-t-il des gens qui jouissent de ce qu’ils possèdent? Les enfants adorables plus haut cités ne tardent pas à délaisser leurs joujoux…] 4. La froideur et la distance que présentent ces patients avec un narcissisme pathologique lorsqu’ils n’ont pas à mettre en jeu leur charme social, leur méconnaissance des autres sauf en les idéalisant temporairement comme source potentielle d’aliment narcissique, et la prévalence du mépris et de la dévalorisation dans la plupart de leurs relations, contrastent encore de façon frappante avec la qualité chaleureuse de l’égocentrisme du petit enfant. [On apprend à la mimer, cette prétendue chaleur.] Poursuivant cette observation de l’histoire du narcissisme de patients narcissiques, on trouve lorsqu’ils ont deux ou trois ans une absence de chaleur normale et d’intérêt pour autrui, et une attitude destructrice et brutale, anormale, très facilement activée. [« Tu l’aimes bien, ton frère, hein? – Non. » Naturellement, ça choque, et l’on apprend à s’abstenir de ce type de réponse. Suis-je le seul à grincer des dents, quand mon neveu de sept ans, qui a peut-être devant lui une belle carrière de narcipat, proclame d’un ton objectif, en présence de l’intéressée, qu’il trouve sa sœur jolie, alors qu’il n’en croit pas un mot, et surtout s’en fout complètement? Cette comédie s’apprend très tôt, et Dieu qu’elle est pénible! La racine de la spontanéité est sciée chez nous : nous sommes tout spectacle. Raison pour qu’il soit si mauvais.] 5. Les fantasmes narcissiques infantiles normaux de puissance, de richesse, de beauté qui proviennent de la période pré-œdipienne n’impliquent pas une possession exclusive de tout ce qui est bon et enviable dans le monde; l’enfant normal n’a pas besoin que chacun l’admire d’être le possesseur exclusif de tels trésors, mais c’est un fantasme caractéristique des personnalités narcissiques. [Mouais. À condition d'admettre qu'elles soient capables d'en rabattre – d'abord, par exemple, en se piquant d'être le meilleur, puis en se contentant d'ajouter sa pierre neuve au pat-de-l'hum.] Dans le narcissisme infantile normal, les fantasmes de triomphe ou de grandeur narcissiques sont mêlés au désir que l’acquisition de ces éléments permettent à l’enfant d’être aimé et accepté de ceux qu’il aime ou dont il veut se faire aimer. [La différence (de nature, ou de degré?) ne résiderait alors que dans le besoin de dépasser le cadre familial trop étroit, et secrètement contesté. Il est significatif que mon neveu, plus haut cité, considère ses parents comme marginaux, et en somme anormaux – qui qui lui ait fourré la norme en tête. [Ne nous cassons pas la tête à “actualiser” son cas. Il a opté il y a au moins deux ans pour l’hyperautocritique verbale, se classe lui-même dépressif, arguant d’une série de symptômes que je reconnais tous pour miens […]. Mais il peut être sauvé par la voie qu’il a choisie, par l’intérêt qu’il porte aux objets, et je doute que mes invites à se (re)connaître dans le miroir que je lui tends lui fassent aucun bien, que ledit miroir soit ou non déformant. […] La patate pourrie gâte ses voisines.]]

 

    Tout ceci a pour conséquence qu’il existe une différence frappante entre narcissisme normal et pathologique. [Certes! Mais entre narcissisme infantile et pathologique, ça me paraît nettement moins bien établi.]

 

 

[1] ou d’une naissance difficile, ou d’un grave état de stress pendant la gestation… […] Ça semble devenir une vérité scientifique que les mômes qu’on hésite à garder le sentent, ou plutôt s’en ressentent.

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