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Inventaire avant liquidation

[Proposition indécente et leçon de morale]

15 Juillet 2015 , Rédigé par Narcipat Publié dans #16 - 17 : La Lettre au Père - Un traître

     Il me semble bien, dès cette première bordée d'aménités, très faiblement justifiées par l’offense, avoir pris le loisir de songer que si Marquise posait les yeux dessus… Mais quoi? Une andouille, doublée d'une traîtresse? C'était elle qui rompait. Et le coquin sans doute se félicitait d'avoir usé du bon hameçon…

     Content d'avoir de vos nouvelles. Si vous voulez tout savoir, je me suis déja dit plusieurs fois que vous ne me répondiez plus parce que vous vous étiez ôté la vie.

     Par ou commencer? par vous dire que j'ai envie que vous lisiez la lettre que j'ai envoyé à Lydie pour m'entendre dire une fois de plus que ce n'est qu'"une bafouille sympa".

     Ne vous vexez pas avec G***, faites-le pour moi. Après tout, elle était à moitié ivre quand elle m'en a parlé, et elle ne m'a pas dit que vous étiez amoureux d'elle et qu'elle vous avait repoussé. Elle m'a juste dit que quand elle était partie avec L*** vous étiez parti parce que vous étiez jaloux. On va pas faire une histoire pour ça!!! De toutes façons, je ne sais pas pourquoi vous lui en voulez tant que ça. Vous savez finnallement, ce n'est pas parce que les femmes ne sont pas votre point fort que je cesserai de vous admirer...bien au contraire. je me fous de cette envie fugace qu'est l'amour, ça n'a aucune profondeur, aucune valeur selon moi. Il n'y a que les cons qui sont obstinés par cette idée de la procréation, il n'y a que les cons qui se fixent de tels objectifs dans la vie...et je reconnais que j'en fais très probablement partie. Bon alors vous ne dites rien à Anne, sinon c'est avec moi qu'elle va se fâcher. De toutes façons elle part en Guyanne et je ne le revoyerai sans doute jamais, mais quand même... […]

     Rien d'autre à vous dire, si ce n'est que j'attend avec impatience ces e-mails plus sérieux dont vous me parlez, et que vous me prométez de m'envoyer bientôt.

     J'aimerais bien lire un peu votre journal intime. Si ça ne vous dérrange pas, vous m'envoyez un passage de celui-ci. Un extrait qui ne soit pas trop "intime", ça risquerait de vous gêner.

     Je vous laisse, et merci de m'avoir répondu.

     Rien de génial, bien sûr, ni même de malin; une surestimation ridicule de son jugement et de son importance; l'admiration s'avère toujours narcissique en dernière analyse, enfin… chez les narcisses; mais rien qui laisse prévoir la suite… ni rien, confessons-le, qui me poussât à en remettre une couche!

     Ne rien dire à la marquise, je ne puis le promettre, trouvant inadmissible qu'elle t'ait conté des choses qui ne te regardaient pas, et qui pis est, de façon conne et erronée : l'ivresse est ici non excusatoire, mais révélatrice : jaloux! Grand Dieu! c'est à pleurer. Mais je désespère de te faire admettre la vérité, à savoir que cette nana m'indiffère totalement, et que je ne vois pas ombre de raison de garder des relations avec elle si je ne peux pas lui faire confiance au moins pour ne pas déblatérer sur mon compte quand j'ai le dos tourné. Tout ce à quoi je puis m'engager, c'est à le prendre cool, m'inquiéter par exemple de l'accident qu'elle pourrait avoir en se marchant sur la langue. Il n'y a que si tu étais amoureux d'elle que je pourrais boucher ma gueule, mais tu ne peux être à la fois au four et au moulin, et j'espère pour toi que ta Lydie est un peu mieux gaulée que cette asperge malsaine. Et note bien que ton “admiration”, dont je me tartine le prose, n'est pas en cause : je ne me donne certes pas pour un Don Juan, avec la tronche que je traîne j'aurais du mal, mais de ma vie je ne suis tombé ni ne tomberai jusqu'à une Anne : mieux vaut être seul que mal accompagné.

     Elle est maquée avec un mec que je trouve à présent plutôt mieux qu'elle, mais qui me paraissait l'an dernier le plus accompli minable de la terre, et avec lequel je n'avais aucune espèce de relation. Elle me taonne pour les accompagner à Barcelone, et j'accepte, après quelque résistance. Le gars Jeff nous emmène visiter des trucs que je connais par cœur, et au bout d'une heure de balade, manifeste l'intention de regagner son foyer : “Je rentre avec J.F., promenez-vous ensemble.” Avec ce con de Lionel, qui n'en avait pas plus envie que moi! J'ai trouvé ça d'une grossièreté inadmissible, je ne tolère pas d'être traité par-dessous la jambe, surtout inconsciemment. D'autre part, Jeff a une femme intelligente et très sympa, mais à peu près aussi attirante qu'une barrique d'huile, laquelle femme m'avait très bien reçu : ça me faisait chier par delà les nues d'être complice de la brisure de son foyer : moucharder or not? Dilemme… Ajoute que je m'ennuyais à mourir avec eux, alors que j'ai toujours été heureux à Barcelone; quand j'ai vu qu'il me fallait de surcroît coucher avec son mec et supporter ses ronflements pour préserver des convenances bidon, je me suis tiré poliment et sur la pointe des pieds à cinq heures du mat, et j'ai été récompensé de cette sage décision par 24 heures de bonheur, dont une avec une superbe pute black levée (ou l'inverse) en bas des ramblas, et qui ne m'a même pas donné le SIDA, ni moi à elle, en dépit d'un craquage de capote. [Bourrage de mou intégral : j’avais repris le train immédiatement; ne subodorais-je pas déjà que ce mensonge serait transmis?] Je ne sais pas pourquoi je te raconte tout ça, au lieu d'aborder le seul sujet qui t'importe, et que je remets encore à plus tard pcq 1) je suis crevé; 2) chose promise chose due; et le devoir barbe; 3) tu m'agaces, avec tes certitudes imperturbables puisées dans les mares du n'importe quoi; un peu comme si je soutenais que tu es amoureux de Marie Chewing-gum, la preuve, c'est que tu n'aimes pas ses cours!

     Je n'ai fait que la survoler, ta bafouille, elle ne m'a pas paru si sympa que ça, engoncée dans le narcissisme et tirant du je à la mitraillette. Pourquoi veux-tu que ton triste sort intéresse cette nana? Ce qui compte, c'est ce que tu as à LUI proposer, et c'est d'ELLE qu'elle veut sans doute entendre parler… Commentaire sérieux avant dimanche, si trop de nouveaux emmerdements ne me choient pas sur le pif. Je ne cesse de courir en tous sens ces jours-ci comme une souris prisonnière.

     Narcisse? Vous avez dit Narcisse? Vous êtes orfèvre, M. Josse… Et dans la bulle de l’autre, le “drame” :

     le desespoir, le désenchantement de la vie, je le connais à présent. J'ai répété à trop de gens ce qui ce passait entre moi et Lydie, et c'est arrivé à ses oreilles, avant hier soir elle m'a appellé en me disant que c'était fini, que je l'avais beaucoup déçue, etc... À 2 heures du mat du même jour, elle m'appelle en disant qu'elle veit passer la nuit avec moi, et comme mes parents sont en vacances, c'est ce qui c'est passé. On a couché ensemble, je n'avais pas de capotes alors on a fait sans, en partant, elle m'a dit que le lendemain elle en emmenerait et qu'on passerait l'après-midi ensemble. Du vent, des nèfles... Elle me rappelle en me disant que si elle a couché avec moi et que si elle m'a dit qu'elle m'aimait c'était parce qu'elle était ivre, qu'elle ne voulait plus sortir avec moi, elle a été aussi très dure en disant que je n'étais que trop égoïste... je n'ai pas dormi, elle me dit que le fait d'avoir répété à mes copains ce qui se passait entre nous lui prouve bien que je ne l'aime pas, alors qu'elle me fait écouter sur son portable les messages les plus intimes de son copain qu'elle dit obstinément qu'elle m'aime. A la question : “Tu baises souvent avec des mecs sans capotes?” elle me répond “ça Joaquim, fallait y penser avant”. Elle me rappelle parfois pour me briser le coeur, pour me répéter que rien n'aurait été possible et même si elle me dit qu'elle ne m'en veut pas, je sans trop bien sa rencune. Je souffre. Si je vous dit tout ça, c'est pour vous redemander de lui écrire une lettre à ma place, mais pas une lettre d'amour à 2 balles, loin de là. Je voudrais que ce soit une lettre qui la descende, qui la foute plus bas que terre, mais qui puisse la séduire en même temps, je ne sais pas si une telle lettre est faisable, mais je compte sur vous. Une fois de plus vous me direz que je n'ai pas de bonnes raison, et que vous ne voulez pas que je me serve de vous de cette manière. Ce n'est pas ce que je vous demande. ce que je vous exige, c'est de me donner un coup de main en écrivant un truc qui tue tout et que je suis incapable d'écrire, après tout les collègues c'est fait pour ça. je vous en prie, écrivez-là au plus vite, soyez altruiste, pensez à moi. je suis égoïste, je le sais mais c'est comme ça, je suis comme ça, je vous en prie, écrivez là...

      Quarante minutes plus tard :

     Je ne sais pas si vous avez tout  à fait pigé. ce que je veux, c'est une lettre agressive, mais attirante à la fois. je veux qu'elle se sente révélée et aimée à la fois, essayez de faire en sorte qu'elle se sente inférieure à moi en la critiquant amèrement mais que ce sentiment d'infériorité la pousse vers moi. En fait elle m'a dit qu'elle croyait m'aimer, mais que depuis que j'ai tout répété elle c'est aperçu que cet amour n'était qu'une illusion, et pourtant quand elle a couché avec moi, elle savait déja que je l'avais répété. Tuez là avec une lettre, foutez là plus bas que terre avec élégance, faites lui sentir que je ne fairai pas un seul pas de plus en avant et que si elle en veut, ce sera à elle de se jetter à l'eau, mais en même temps, essayez de lui donner envie de moi, essayez de trouver des éléments, des arguments qui pourraient la pousser à m'aimer à nouveau.

     Enfin, faites lui sentir que je suis quelqu'un d'orgueilleux, qui ne perd pas son honneur n'importe comment...je veux mourir la tête haute.

     Je compte sur vous. Si je pouvais avoir la lettre mardi à midi ce serait parfait. Merci d'avance

     Étrange et nauséabond délire… mais toujours cette profession de foi en le pouvoir de l'écriture, et notamment de la mienne, qui ne pouvait m'être tout à fait antipathique…

     On en tombe sur le cul de constater que tu ne doutes pas un instant que je me lance toutes affaires cessantes (et j'en ai sur la planche) dans ce boulot de cassage/séduction qu'il est déjà bien sordide de demander, et qu'il serait infâme ou carrément fou d'effectuer. Serions-nous les meilleurs amis du monde que je t'enverrais chier sans état d'âme, or on en est loin, et de plus en plus à chaque mail qui passe et qui tire encore le voile sur le rictus hideux de ton égocentrisme. Non seulement cette fille ne m'a rien fait, mais je ne vois pas en quoi elle mériterait d'être “mise plus bas que terre” plus qu'une autre, et notamment plus que toi. Elle t'a fait cadeau d'une nuit, ça m'étonnerait que ce soit pour te filer le SIDA ou te faire mieux souffrir ensuite; en fait il t'a suffi d'une nuit pour la décevoir, c'est ça que tu ne supportes pas. Ça ressemble à quoi, franchement, de professer l'égoïsme et d'exiger l'altruisme des autres? “Moi, je m'occupe de moi exclusivement; vous, occupez-vous de moi.” Bel échange économique! Si quelqu'un te gênait, tu trouverais sans doute tout normal qu'un pote aille le tuer pendant que tu resterais à couvert, comme un véritable salaud, que seule la folie excuse. Je ne connais pas cette fille, il m'est donc impossible d'écrire quelque chose de pertinent, je n'ai pas ombre de raison de lui faire du mal (“les collègues, c'est fait pour ça” : on croit rêver! Et toi, tu es fait pour quoi?) et de plus j'ai déjà écrit des chefs-d'oeuvre pleinement adéquats à des filles que j'aimais et qui ne m'en ont pas moins plaqué! Toi qui ne me lis pas, et qui avales sans mâcher le “zéro en femmes” que me colle Anne, je ne comprends pas que tu sacralises mon Verbe de la sorte. Tout ce que je pourrais faire, à l'extrême rigueur (et note bien que je ne m'y engage pas) ce serait d'écrire DIRECTEMENT à ta nana, sans passer par toi, en aucun cas pour la “tuer”, et ça m'étonnerait que ça corresponde à ton désir, et qu'il en sorte du positif. S'il y a quelque chose à comprendre, c'est qu'elle t'a essayé une nuit où elle était pompette et où elle n'avait personne sous la main, et que tu n'as pas su saisir ta chance, peut-être parce que tu baises mal, plus probablement parce que tu n'as pensé qu'à toi, et manifesté trop d'assurance et d'autosatisfaction; mais comme je n'ai pas le détail (à part ta question sur les capotes, qui me paraît particulièrement lamentable), et que rien de ce qui passe par ta compréhension n'est fiable à plus de 50%, car tu n'es pas très conscient, comment savoir? Il est indéniable que tu t'es montré une vraie truffe de parler à des copains qui pouvaient lui répéter tes propos, que tu es idiot d'exiger d'elle de la logique en ce domaine comme en tous les autres, qu'une fille peut décrire ton pénis à cent copines et imperturbablement te faire un crime d'une allusion légère à ton ami le plus intime; d'autre part, ta logique à toi pèche totalement, car ce n'est pas TOI qu'elle trahit en te faisant écouter les messages d'un autre, elle te prend pour confident, et toi c'est à d'autres que tu vas causer! Ce n'est pas de tout lui dire À ELLE qu'elle te fait grief; et si elle va un peu loin en concluant à l'absence d'amour, on comprend très bien que cet amour bavard ne lui paraisse pas l'idéal. Avec ça elle couche le lendemain, soit, et il n'est pas totalement impossible que ça se reproduise, non seulement “elles” sont imprévisibles en général, mais il s'agit ici d'une fille perturbée par une rupture (sans doute peu durable) qui se débat et essaie tout, qui a besoin d'être dorlotée, et qui, pas de pot, tombe sur un merdeux fasciné par son propre nombril. Tu vois que je ne renonce pas à la carrière de killer, mais je choisis mon gibier.

     Au lieu de “tout tuer” par la plume d'un autre, c'est un retour non pas À, mais SUR toi-même que tu dois opérer : comprendre que l'égoïsme (l'égocentrisme plutôt) pour lequel tu t'es fait jeter n'est pas une donnée de nature que les autres n'ont qu'à accepter, mais une TARE corrigible. La belle bafouille que je ne te ferai pas, loin de flirter avec le meurtre, le raidissement, la hauteur, qui ne te mèneront à rien, doit INTÉGRER le point de vue de Lydie, et pour cela préalablement le capter. Or je ne crois pas qu'il soit très éloigné du mien : tu séduis parce que tu es poli, marrant, que tu sembles t'intéresser aux autres in se; quand on s'aperçoit que tu te révèles grossier, pas drôle du tout, et uniquement intéressé par ta personne, la déception peut être immense, non pour moi qui ne suis pas pédé, mais pour une fille qui te faisait confiance. La douleur du moment serait bénéfique si elle te donnait l'occasion de changer pour de bon, au lieu de geindre que tu es malheureux, et as été indignement traité; en tout cas, si tu ne changes pas vraiment, tu ferais bien de faire semblant, de reconnaître tes torts, TOUS les torts, et de T'OCCUPER D'ELLE, comme je ne cesse de te le répéter depuis le début, au lieu de taper des mélopées comme quoi tu ne dors pas de la nuit, seul avec ta souffrance, dont personne n'a rien à cirer, et c'est justice, puisque tu n'as rien à cirer de celle des autres.

     « Tu t'es montré une vraie truffe » Vous êtes orfèvre, M. Josse!

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