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Inventaire avant liquidation

[Le trouble de la personnalité narcissique selon le DSM V]

7 Avril 2017 , Rédigé par Narcipat Publié dans #58 : Narcissisme 1 : DSM

    La cinquième édition du DSM, parue en 2013, semble avoir passablement agité le landerneau anglophone. La personnalité narcissique n’est pas éliminée du manuel, comme le bruit en avait couru, mais elle a connu quelques remaniements d’envergure. Quoique le bouquin ait été traduit en 2015, et fortement conspué, je n’en ai, début 2017, trouvé d’exemplaire en français ni sur eBay ni dans les bacs de soldes de Gibert. Je me résous donc à déballer l’anglais :

 

     The essential features of a personality disorder are impairments in personality (self and interpersonal) functioning and the presence of pathological personality traits. To diagnose narcissistic personality disorder, the following criteria must be met : 

 

A. Significant impairments in personality functioning manifest by : 

1. Impairments in self functioning (a or b) : 

a. Identity : Excessive reference to others for self-definition and self-esteem regulation; exaggerated self-appraisal may be inflated or deflated, or vacillate between extremes; emotional regulation mirrors fluctuations in self-esteem. 

 

b. Self-direction : Goal-setting is based on gaining approval from others; personal standards are unreasonably high in order to see oneself as exceptional, or too low based on a sense of entitlement; often unaware of own motivations. 

 

    AND 

 

2. Impairments in interpersonal functioning (a or b) : 

a. Empathy : Impaired ability to recognize or identify with the feelings and needs of others; excessively attuned to reactions of others, but only if perceived as relevant to self; over- or underestimate of own effect on others. 

 

b. Intimacy : Relationships largely superficial and exist to serve self-esteem regulation; mutuality constrained by little genuine interest in others’ experiences and predominance of a need for personal gain 

 

B. Pathological personality traits in the following domain: 

1. Antagonism, characterized by: 

a. Grandiosity : Feelings of entitlement, either overt or covert; self-centeredness; firmly holding to the belief that one is better than others; condescending toward others. 

 

b. Attention seeking : Excessive attempts to attract and be the focus of the attention of others; admiration seeking. 

 

[Il n’y a pas de 2, du moins dans les docs que j’ai trouvés.]

 

C. The impairments in personality functioning and the individual’s personality trait expression are relatively stable across time and consistent across situations. 

 

D. The impairments in personality functioning and the individual’s personality trait expression are not better understood as normative for the individual’s developmental stage or socio-cultural environment. 

 

E. The impairments in personality functioning and the individual’s personality trait expression are not solely due to the direct physiological effects of a substance (e.g., a drug of abuse, medication) or a general medical condition (e.g., severe head trauma).

 

   Les précautions C, D, E se retrouvent à tout profil : on ne peut diagnostiquer un disorder spécifique que si les caractéristiques présentent une certaine stabilité, et si elles ne relèvent pas d’un stade du développement, d’un environnement socio-culturel, de l’abus de quelque substance, ou d’un gnon sur le crâne.

 

     Assez enquiquiné d’être acculé à traduire : il me semble à peu près tout comprendre, mais je peine parfois à le rendre : que faire, par exemple, des récurrents impaired, impairment? Dysfonctionnement me gêne, non seulement à cause du fonctionnement qui suit, mais parce que dysfunction existe en anglais. Le vague trouble? Objection similaire : on disposerait de disorder, dans le titre même. Et je n’en buterais pas moins sur impaired : “troublé”, “altéré”, “détraqué”, “désorganisé”, etc, supposant un bon état préalable; et “déficient” n’étant qu’un pis-aller, puisqu’il renvoie à un manque plutôt qu’à une malformation. Quant à la terra incognita de tout ce que je crois piger, mais ne pige pas, passons-la sous silence, puisque je n’y ai nul accès : après tout, peut-être commencé-je à accepter un peu mieux ma finitude. Après avoir massacré cinq ou six bouquins, j’ai en tout cas admis que je ne valais pas un poil de cul comme traducteur. Ce parapluie ouvert, avançons :

 

A. Troubles significatifs du fonctionnement de la personnalité, manifestés par :

1. Des troubles du fonctionnement du soi (a ou b) : 

a. Identité : Référence excessive aux autres pour la définition de soi et la régulation de l’estime de soi; l’auto-évaluation est exagérée dans le sens du meilleur ou du pire, ou oscille d’un extrême à l’autre; la régulation émotionnelle reflète les fluctuations de l’estime de soi. 

 b. Direction du soi : Les objectifs sont fixés en vue d’obtenir l’aval d’autrui; les normes personnelles [Il existe peut-être une traduction “standard” pour personal standards, (et pour self-direction, et tout le reste!) mais je ne la (les) connais pas : il s’agit ici, ce me semble, des normes qui régissent les exigences qu’on a vis-à-vis de soi.] sont déraisonnablement élevées, pour permettre au sujet de se voir comme exceptionnel, ou trop basses, sur la base du sentiment de jouir de droits spéciaux [Affreux! Outre qu’elles sont low based, sans virgule… Mais on comprend, j’espère, que notre bon vieux self-entitlement puisse nous porter à nous satisfaire d’accomplissements dérisoires? C’est de moi, donc c’est exceptionnel : ne suis-je pas tenté souvent de sacraliser la moindre crocrotte qui tombe de ma plume, en adoptant le point de vue d’un universitaire du futur qui étudierait mon œuvre, et gloserait avec révérence mes bévues et lapsus? Ne considéré-je pas in petto comme une grande date dans l’histoire de la conscience de soi un Inventaire avant liquidation que je n’ai pas craint, in limine, de confronter à la Recherche du temps perdu, et qui pourrait bien n’être qu’une diarrhée de prose paresseuse et inculte? N’ai-je pas nourri la crypto-conviction que, quoiqu’éjaculateur précoce, vite essoufflé, caustique et le plus souvent insupportable, mes compagnes devaient me considérer comme irremplaçable? Et au fond, y a-t-il un tel fossé entre une exigence minimale et une démesurée, dès lors qu’on se résigne en douce à ne jamais y satisfaire? Ma main au feu qu’en ce qui me concerne, si je me fixe des objectifs grandioses et me fais une loi de l’insatisfaction, c’est pour disqualifier les succès “minables” d’autrui, et surtout pour ne pas regarder ma médiocrité en face : certes, j’aurai échoué, mais là ou nul ne pouvait réussir : avec ça, à quoi donc aboutis-je, sinon à un équivalent de me contenter de peu?]; souvent inconscient de ses motivations. [mais pas toujours!]

     ET

 2. Des troubles du fonctionnement interpersonnel (a ou b): 

a. Empathie : Capacité déficiente à reconnaître les sentiments et besoins d’autrui, et à les éprouver [??? s’y identifier? “identify with” mais sans COD : ?? s’y projeter? s’y investir?] Excessivement sensible [attuned : en phase avec, branché sur? En principe non, puisqu’on “nous” refuse l’empathie.] aux réactions des autres, mais seulement si elles sont perçues comme concernant le sujet; sous-estime ou surestime l’impact qu’il a sur les autres. 

 b. Intimité : Les relations sont très superficielles, et destinées à réguler l’estime-de-soi; la réciprocité est limitée par un intérêt spontané minime pour les expériences d’autrui, et la prédominance d’un besoin de bénéfice personnel. [Gain ou profit supposeraient à mon sens davantage de matérialité. Le problème ici, c’est que le bénéfice personnel ne comprend pas celui que le sujet pourrait tirer des expériences d’autrui, qui ne l’intéressent pas : ou il s’agit de la simple et niaise dénonciation d’une absence d’altruisme (et l’on peut se demander chez quels saints le bénéfice personnel ne serait pas prédominant dans toute relation humaine) ou l’on vise ici le bénéfice d’image – lequel peut inclure des avantages matériels, mais à titre d’indices de valeur. Le terme exploitation serait donc à mon sens malvenu.]

 B. Des traits de personnalité pathologiques dans les domaines suivants : 

1. L’antagonisme, caractérisé par : 

a. L’outrecuidance [ou “grandiosité”] : Sentiment, manifeste ou voilé, d’avoir des droits spéciaux, [qu’on lui doit quelque chose, mais il s’entend bien qu’il s’agit d’une ration (d’égards, d’amour, d’admiration plus que de frites ou d’émoluments) supérieure à celle qu’est en droit d’attendre l’humain lambda]; égocentrisme; ferme conviction de valoir plus que les autres; condescendance à leur égard. 

b. La recherche d'attention : Efforts excessifs pour attirer l’attention d’autrui et en être le centre; quête de l’admiration.

 

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